samedi 25 juillet 2009

NO MEMORY DAYS

Il y a parfois des jours qui ne se résument qu'à 9 192 631 770 oscillations d'un atome de césium.

Il ne reste aucune trace de ces journées, il ne s'est rien passé d'extraordinaire. On a dit bonjour comme ça à quelques têtes habituelles sans avoir grand chose à échanger.
Aucune découverte, aucun "accident". Le gris moyen, quoi.

Par exemple, si je vous demande: vous vous souvenez du 12 novembre 2006?
Si ce n'est pas l'anniversaire d'un de vos proches ou le jour où vous êtes tombé amoureux ou bien celui où on vous a annoncé que vous alliez devenir parent ou encore celui où un de vos potes s'est blindé en bagnole après une soirée arrosée, eh bien ça ne vous dit rien.

Et je suis sûr qu'en faisant un peu le compte, vous allez découvrir que sur une année, une majorité des journées sont assez proches de ce gris moyen.
Si ça ne vous dérange pas, tant mieux. Moi si. Le gris moyen, c'est la couleur la plus présente dans les cimetières.

Quand j'étais môme, j'avais récupéré un stock de sachets plastiques et j'avais entrepris chaque jour d'en remplir un d'un petit objet symbolique de la journée et qui serait un support de mémoire pour me rappeler le parfum de ce jour-là. Ca pouvait être un fossile trouvé sur la colline, une vieille pièce ramassée au bord de la Loire ou encore un crayon de couleur piqué dans la classe à un mec que je ne pouvais pas blairer.
Le problème, c'est qu'au bout de quelques mois, je ne savais plus quoi faire de tous ces sachets, de plus en plus nombreux. De plus ma mère, les ayant trouvés remplissant plusieurs tiroirs dans ma chambre, avait commencé à se demander si je n'étais pas un peu psychopathe. Et puis, avec le temps, je finissais par ne plus très bien savoir l'histoire de certains de ces objets et comment ils avaient atterri là. Ca n'avait plus de sens. Alors, j'avais tout jeté. Sauf le crayon de couleur, que j'avais remis discrètement dans la trousse du mec que je ne pouvais pas blairer.

C'est à ce moment-là, je crois, que j'ai décidé de mettre de la couleur dans chaque journée: écrire mes émotions, les peindre, les sculpter, les prendre en photo. Non pas pour raconter mon histoire de manière narcissique, ça je m'en fous, mais pour raconter celle d'un humain parmi d'autres et qui, comme presque tous ses semblables, ne veut pas que son existence se résume au néant.